dimanche 10 janvier 2010

MATONGUE : LE PARADIS DES IMMIGRES CONGOLAIS

             C'était voir Matongué et mourir. Bien sûr, il y a eu Venise! Il y a eu Paris. Il y a toujours ces villes là dont on rêve. Suivant qu'on est amoureux, pour Venise et amateur de mode pour Paris et saTour Eiffel. Mais pour nous, ressortissants de la République Démocratique du Congo, c'était Matongué l'endroit rêvé.
Même s'ils n'ont jamais vraiment fait de gros gestes pour faciliter l'intégration des congolais en Belgique, ce pays nous a tout de même accordé un espace commercial, à savoir la Galerie d'Ixelles, à exploiter. Rappelons que le Congo était la seule importante colonie belge à travers le monde. D'abord, propriété privée du roi Léopold II, la RDC, quatre vingt fois plus grand que la Belgique, fut ensuite donnée au Royaume par le "généreux Roi". Grâce à ses richesses, les Belges n'envisageaient pas de le quitter... Matongué devait donc beaucoup compter pour les congolais.
              Moi personnellement, je n'ai pas connu la grande époque du couturier Fabrice, immortalisé par feu le Grand Maître Luambo Makiadi dans la chanson "Fabrice akolatisa yo". Ni le restaurant chez BABIN, "mobali ya libinza" et autres chez Mambo qui se maintient encore tant bien que mal. En tous les cas, je me rappelle qu'en 1985 on allait ,nous de Lille, à Bruxelles comme à une fête. 1985,  me direz-vous ce n'est pas bien tôt. D'accord mais quand on se réfère à l'époque des tous premiers "belgicains", qui quand ils rentraient au pays, nous parlaient à nous qui étions restons là-bas en lingala des "basangos", les prêtres blancs comme s'ils avaient perdu l'accent de la naissance.
En 1985 donc, quand je suis allé à Matongué, il fallait bien se saper. Faire voir quelque part qu'on revenait de France, aussi bien pour les amis de la Belgique que pour les autres qui pouvaient venir d'ailleurs. Il n'était pas rare en effet, d'y rencontrer des amis ou de la famille qui seraient venus de la Hollande toute proche, de la Suisse, voire de l'Allemagne. On peut s'imaginer alors la franche joie des retrouvailles.
La St Pauli's, la Amstel et autres bières de luxe qui n'étaient pas dans toutes les bourses au pays, y étaient à la portée de tout le monde!
Dans la galerie, tout devenait possible,tellement simple et donc magique. De sa table, on pouvait avoir n'importe quel voisin, personnalité politique ou star du showbiz. Tous les "mabangas"de l'époque. En ces temps là, "Château Rouge "à Paris n'existait pas. Le RENDEZ-VOUS, c'était à Bruxelles, baptisé "lola", le paradis.
          Là , on pouvait faire ses courses. S'il fallait manger les produits frais en provenance du pays, on se rendait à Matongué. On y trouvait du tout pour faire la fête.
         Matongué, jadis amphithéâtre de la fête, n'est plus que l'ombre de lui-même.A cela beaucoup de raisons dont principalement les différentes politiques d'intégration. Il ne faut pas oublier qu'à côté de ce tableau de rêve,  il y avait toujours des contrôles inopinés d'identités. Et cela se confirme par l'installation, à ce jour, d'un bureau de police.
Nous n'oublierons pas de dire notre part non négligeable de responsabilité, en ce sens que nous  n'avons pas su profiter de l'opportunité qui nous a été offerte de faire nos preuves, au lieu d'exceller dans les futilités.Entre-temps, Château Rouge prenait ses marques à Paris. Un peu partout à Londres, en Allemagne, les congolais montaient des commerces et des entreprises. Matongué ne pouvait pas rester éternellement au top. Mais il doit exister et être là de façon symbolique. Les Belges ont laissé Mobutu détruire tout le patrimoine culturel colonial en R.D.C . Qu'ils ne laissent pas la Galerie aux nouveaux voyous, les New Jack, pour y commettre des méfaits que l'on sait et qui ont été à l'origine de l'insatallation du bureau de police, ni ne bradent cet endroit aux asiatiques à des fins commerciales. Nul n'ignore la contribution des richesses de la République Démocratique du Congo à l'essor économique de la Belgique. Ce n'est pas leur demander la lune, que de nous laisser à nous congolais une petite zone d'activité, à savoir la Galerie d'Ixelles, qui nous rappelle, à la diaspora, le quartier Matongué à Kinshasa, où il fait bon vivre.

Ndlr: cet article a été publié en octobre 2004 dans le premier numéro du rdcnews paru à Lille. Aujourd'hui, Matongué a complètement changé de visage voire d'activités. Il est mal famé. Des jeunes fumant du cannabis y sont de plus en plus nombreux. Il y a même eu un meurtre pour histoire de vol de portable, semble-t-il. La salubrité n'y a vraiment jamais existé. Poto oyo tolobaka poto de fois tu ne te croiras même pas na poto. Ba toilettes mawa trop.
Combien de cafés et restaurants n'ont-ils pas été férmés par les services d'hygiènes belges pour cause d'insalubrités! j'avais tenu à m'exprimer sur cet aspect des choses dans le cadre de l'avenir du Congo.

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